vendredi 26 juin 2009

Amnistie

La nuit tombait
Et nous l'avons laissé faire

Le premier mai dernier, je parlais de cet ancien nazi déporté vers l'Allemagne pour y être jugé pour crimes de guerre.
Monsieur Demjanjuk est vieux, malade et il s'est refait une vie d'allure honorable aux États-Unis. Est-il devenu un bon gars, bon travailleur, bon père de famille ? Je n'en sais absolument rien. Et cela n'a pas une grande importance à mes yeux.
Mais je crois que l'humanité se déshonore en s'acharnant sur des coupables qu'elle transforme en victimes.
Il y a longtemps que nous aurions dû passer l'éponge sur cette période sombre.
Pourquoi ne l'avons nous pas fait ?
Je crois que c'est pour nous débarrasser de cette vieille culpabilité que nous continuons de nier.
Cette indicible tragédie qu'a été la deuxième guerre mondiale aurait probablement pu être, au moins partiellement, évitée n'eut été de l'aveuglement volontaire de notre beau monde occidental et démocratique qui a manifesté autant de tolérance envers l'intolérance.
L'histoire d'un cauchemar, pourtant prévisible, dont personne n'a voulu s'éveiller. Parce qu'on est si bien dans son lit.
Mein Kampf, ce médiocre pamphlet d'Adolf Hitler annonçait pourtant clairement les couleurs du massacre à venir. On a toléré qu'il envahisse ses voisins en se disant que ce n'était pas dans notre cour. Et quand la réalité nous a finalement rattrapé, des millions de morts étaient inscrites dans les astres.
Et aujourd'hui, on continue de poursuivre des octogénaires pour continuer de masquer notre propre lâcheté. Il est déjà trop tard pour accorder le pardon aux survivants de cette erreur de jugement.
Les coupables partagent avec nous leur culpabilité. Et si on les punit, eux, nous devrions aussi partager leur punition.

Le soir tombait
Et nous l'avons laissé faire

le retard du pardon

4 commentaires:

Lurchy baby a dit…

NON MONSIEUR!

100% en DÉSACCORD!

Le 10 juin dernier, au Holocaust Memorial Museum de Washington, un "white supremacist" a abattu un gardien et a été descendu avant qu'il soit en mesure de tuer quelqu'un d'autre. Sur place, une survivante des camps a été forcée de revivre la folie haineuse. Le malade dénonçait l'holocauste sur son Website en tant que fumesterie. Son âge: 88 ans! Son arme est tellement ancienne que même les experts du FBI ne peuvent en authentifier la provenance.

La haine n'a pas d'age. La méchanceté et la perversité non plus.

Aussi bien pardonner à ce chien d'ayatollah Khamenei l'assassinat de la jeune Neda par ses sbires sous prétexte qu'il est vieux et fidèle croyant. Tant qu'à y être pourquoi ne pas accuser la CIA d'avoir tué la fille? Ça trouve toujours preneur une histoire comme çà.

Non monsieur, le crime n'a pas d'âge.

Le châtiment non plus.


Achille Talion

le neurone ectopique a dit…

Pleins d'arguments à opposer :
- rien n'indique que Demjanjuk ait éprouvé ou éprouve de la haine : en fait, son comportement des 50 dernières années tend à démontrer le contraire.
- s'il devait avoir éprouvé de la haine, il a eu le temps de l'évacuer mais comme des centaines de milliers d'autres, il a probablement suivi les ordres parce qu'il n'était pas assez fort pour y désobéir. À cet égard, le film The Reader (Le Liseur) donne une assez bonne idée de ce qu'une grande partie de ceux que nous considérons coupables ressentaient
- l'âge n'est effectivement pas un critère, la connerie débute avec ce qui devrait être l'accès à l'intelligence et se termine avec la mort
- comme je le dis dans mon billet, le peuple allemand a souffert de l'inertie des alliés face à ses dirigeants. Ceux qui ont laissé Hitler mener son pays à la guerre ont leur part de responsabilité dans ce désastre : n'y aurait-il pas une grande part de culpabilité dans l'attitude de notre société dans toute cette histoire
- il n'y a pas de commune mesure entre un dirigeant (Khamenei) et un exécutant de troisième ordre (Demjanjuk)
Je suis entièrement d'accord avec le fait que le crime n'a pas d'âge, et même qu'il est beaucoup plus facile de devenir meurtrier à 88 ans alors que la prison à vie ne veut plus rien dire.
Mais je crois que plus de 60 ans après les faits, le temps est amplement venu de pardonner.

la fin des hostilités

Lurch le Terrible a dit…

"There's nazis in the bathroom
Just below the stairs"
John Lennon

Premièrement, Le Lecteur est un roman et bien que j'adore Kate Winslet, je ne voudrais en aucun temps mélanger la fiction avec la réalité des camps.

Demjanjuk n'est probablement pas le "Ivan the terrible" de Treblinka mais je doute qu'il ait les mains propres. En tous cas, il a menti sur ses papiers d'immigration, ce qui est un indice immanquable d'une conscience pas très nette. Y'a peut-être pas feu, mais en tous cas, c'est pas la boucane qui manque.

Tu sais c'est pas Khamenei qui a tiré sur la jeune Neda, mais justement un exécutant de troisième ordre, comme Demjanjuk. Devrait-on lui pardonner parce qu'il ne faisait que suivre les ordres?

Le danger avec le pardon c'est qu'il appelle à l'oubli, question de nous faciliter le passage vers quelque chose de plus positif. Mais oublier les leçons de l'histoire, c'est une invitation grande ouverte au recommencement.

Tu vois, ça fait 400 ans que notre chère Église s'est acharnée sur Galilée, et encore aujourd'hui, je suis complètement, TOTALEMENT incapable de lui pardonner cette injustice.

Pourquoi pas pardonner à Mark David Chapman? Après tout, ça va faire bientôt 30 ans et son comportement est exemplaire depuis qu'il est en dedans.

Je sais le pardon est divin. Le problème c'est que je suis athée.

Je crois que ton problème vient du fait que tu ressens une part de culpabilité devant l'inertie de notre monde occidental. Je trouve pourtant bizarre que tu te culpabilise pour des faits qui sont arrivés avant ta naissance.

Si au moins tu te sentais coupable pour ce qui est arrivé au Rwanda.

Ou pour ce qui se passe au Darfour, tant qu'à parler de l'inertie du monde occidental...

Oui je sais, c'est en Afrique et ça ne compte pas.

le neurone ectopique a dit…

Alors continuons :
- la valeur du pardon n'a rien à voir avec la religion et je serais tenté de dire au contraire
- je n'ai personnellement aucune culpabilité face à la deuxième guerre mondiale et à tous les massacres commis depuis : je crois simplement que l'attitude envers Demjanjuk est le reflet d'une culpabilité
- il faut admettre :
1) que le fait d'avoir travaillé dans un camp de concentration n'amène pas une condamnation automatique : 3 des 22 accusés d'Auschtwitz ont été acquittés
2) que Demjanjuk a déjà été subi plusieurs procès, qu'il condamné à mort, qu'il a été détenu pendant sept ans, qu'il a perdu sa citoyenneté américaine et qu'il a fallu le transférer en Allemagne sous supervision médicale alors qu'il n'a pas commis d'acte répréhensible depuis plus de 64 ans.
Tu m'excuseras mais c'est pour moi que de l'acharnement.
- pardonner à Mark David Chapman, ce n'est pas à moi de le faire, mais je considère que trente ans de détention pour un meurtre, cela dépasse même les normes habituelles de notre société. S'il m'avait tué, moi, il y a longtemps qu'il aurait été libéré.
- il y a dans l'homme une capacité de sauvagerie, de méchanceté, de cruauté et tu peux continuer la liste de termes semblables, qui dépasse mon entendement.
- je me contente d'essayer de me rendre utile. C'est peu, mais j'ai appris à m'en contenter.
- et quand j'essaie de me rendre utile, je ne tiens pas compte de la couleur de la peau, de la religion, ni même de la sympathie que la personne m'inspire. Alors, pour l'Afrique, tu m'excuseras mais tu vas beaucoup trop loin.

le missionnaire agnostique